Reproduction des vaches de boucherie par insémination artificielle synchronisée

À titre de stagiaire d'été à ce qui s'appelait auparavant le New Liskeard College of Agriculture Technology (NLCAT), j'ai été engagé pour collaborer à un programme de recherche sur la synchronisation des chaleurs chez les vaches afin qu'elles vêlent autour de la même période. On m'avait prévenu de m'attendre à être très occupé dès le début, puisque ma première journée de travail correspondait à la date de début des vêlages. Malheureusement, ou heureusement, pour l'inexpérimenté étudiant universitaire que j'étais, les résultats de gestation obtenus dans le cadre du programme de synchronisation, à l'aide d'un produit appelé Synchromate B, étaient très faibles, ce qui a donné une saison de vêlage lente et peu mouvementée. Sans flancher, la recherche s'est poursuivie avec l'essai de différents programmes et méthodes de synchronisation des chaleurs chez les vaches de boucherie du NLCAT devenu aujourd'hui la Station de recherche en agriculture de New Liskeard (NLARS).

Cet été-là, nous avons fait l'essai d'une méthode dans le cadre de laquelle on séparait les veaux des vaches pendant 48 heures, en espérant stimuler les hormones de reproduction. Je me rappelle qu'on a surtout stimulé beaucoup de vaches à devenir très énervées. La donne a changé à la station de recherche en ce qui a trait aux méthodes de synchronisation des chaleurs au milieu des années 1990 avec l'avènement du programme CIDR-Ovsynch. Dans le cadre de ce programme, un dispositif de plastique en T imprégné de progestérone est inséré dans le vagin de la vache et des traitements hormonaux complémentaires sont utilisés pour programmer les vaches à une insémination synchronisée. La station de recherche de New Liskeard est l'une des stations qui sont associées à l'Université de Guelph. Collaborant étroitement avec les chercheurs de Guelph dans le domaine de la reproduction animale, la station de New Liskeard a perfectionné le procédé, offrant ainsi à l'industrie un protocole standard permettant d'utiliser efficacement l'insémination artificielle à la ferme et de synchroniser les chaleurs des vaches pour que les vêlages au sein du troupeau se produisent autour de la même période. Actuellement, les vaches et les génisses sont synchronisées à l'aide d'un traitement hormonal et sont inséminées le jour 8 suivant le début de la synchronisation.

Produits utilisés dans le cadre de ce protocole :

  • CIDR : dispositif interne (intravaginal) de libération contrôlée de médicament
  • GnRH : hormone de libération des gonadotrophines
  • PG : Prostaglandine

Figure 1. CIDR (dispositif interne de libération contrôlée de médicament) et applicateur

CIDR (dispositif interne de libération contrôlée de médicament) et applicateur
Ces produits peuvent être utilisés de manière stratégique en vue de modifier le cycle œstral des vaches du troupeau afin que toutes les vaches soient inséminées en même temps. Cette méthode diminue les besoins en main-d'œuvre et favorise une utilisation efficace des ressources requises pour l'insémination artificielle. De plus, la période des vêlages est moins étalée, ce qui réduit aussi la main-d'œuvre et améliore l'efficacité au moment des mise-bas.

Figure 1. Protocole d'insémination planifiée (première IA)
Protocole d'insémination planifiée (première IA)

Figure 2. Protocole d'insémination planifiée (deuxième IA)
Protocole d'insémination planifiée (deuxième IA)
Picture

*Exemples de marques de produit transmis par le groupe de travail sur la reproduction des bovins de boucherie, 2016.

Les vaches et les génisses sont programmées en même temps et sont toutes inséminées à la même date prédéterminée.

Au jour 28 suivant l'insémination, les femelles reproductrices sont reprogrammées avec le CIDR et on leur administre de l'hormone de libération des gonadotrophines (GnRH). Au jour 33 suivant l'insémination, les CIDR sont retirés et les vaches sont examinées par ultra-sons pour vérifier si elles sont gestantes. Les vaches non gestantes reçoivent alors une seconde dose de prostaglandine.Le jour 36 suivant la première insémination, elles sont de nouveau inséminées artificiellement.

Ce protocole exige beaucoup de manipulation sur de courtes périodes de temps, mais son efficacité à déclencher la gestation a été démontrée.

Tableau 1: Taux de gestation obtenus par insémination artificielle planifiée (NLARS)

 
1 ère synchro
Reprise d'insémination
Total
Femelles gestantes
161
47
208
Femelles non gestantes
69
22
22
Nombre total de femelles dans le groupe
230
69
230
Taux de conception
70 %
68,2 %
91 %

Si l'on estime qu'un bon taureau va féconder environ 70 % des vaches avec lesquelles il s'accouple dès la première saillie, les résultats de la première insémination planifiée sont à peu près les mêmes. En poursuivant avec une deuxième IA planifiée, 91 % des femelles reproductrices deviennent gestantes à l'intérieur d'une période de 36 jours.

Comparaison des coûts

Le Tableau 2 fournit les coûts de planification et de reproduction de vaches par insémination artificielle. Ces coûts ont été calculés sur une base de 100 vaches, puis ramenés par la suite à un coût par vache, en fonction des taux de gestation, et des différents usages.

Les CIDR sont réutilisés pour la deuxième synchronisation. Un seul coût de test de gestation a été calculé. Bien que deux tests soient requis, on présume que le coût des saillies par un troupeau régulier de taureaux reproducteurs inclut aussi le coût d'un test de gestation. Aucun frais de semence n'a été inclus. On présume que le coût d'un taureau pour saillir une vache est le même que celui d'une pipette de semence.

Tableau 2. Coût de l'insémination artificielle réalisée dans le cadre du programme CIDR-Ovsynch

Coût par gestation 1
Matériel et services
1er synch
2e synch
CIDR
20,00 $
-
GnRH (2)2
5,20 $
3,38 $
Prostaglandine (2)3
8,30 $
2,49 $
Main-d'œuvre 20 $/hr4
6,67 $
2,00 $
Services d'IA
15,00 $
4,50 $
Test de gestation
5,00 $
-
Total
60,17 $
12,37 $
Coût total par vache basé sur un taux de gestation de 91 %
-
72,54 $

1Coût basé sur le %, échantillon de 100 vaches.
2GnRH administré à chaque vache, 2 doses la 1re fois et 1,3 dose la seconde fois, basé sur un taux de gestation de 70 % à la première insémination.
3 Prostaglandine administrée à chaque vache ,2 doses à la 1er synch. et 2 doses X 30 % à la 2e synch.
4 5 manipulations de 4 minutes par vache.

Le coût total de reproduction d'une vache par insémination artificielle dans cet exemple s'élève à 72,54 $.

Coût d'utilisation d'un taureau

Comment ce coût se compare-t-il à celui d'avoir un taureau qui assure les saillies? Si l'on comptabilise les coûts approximatifs d'alimentation et de soins de santé pour l'entretien d'un taureau, le coût pour rendre une vache gestante par une saillie de taureau est estimé à 52,50 $ (tableau 3).

Tableau 3. Coût d'un taureau par vache

Intrants
Taux d'utilisation
Coût
Fourrages entreposés pour un taureau de 2 000 lb @ un taux de prise alimentaire de 2,5 % 240 jours @ 5 $ par jour
1 200 $
Alimentation au pâturage 125 jours @ 3 $ par jour
375 $
Coût total par vache gestante * -
52,50 $

Les coûts incluent les frais d'alimentation et de santé et un test de semence annuel.
*Base de 30 services par taureau.

Alors que sur papier, le recours à un taureau pour la saillie semble 20 $ moins cher par gestation, on constate par ailleurs qu'en examinant en détail le protocole d'insémination artificielle, celle-ci procure de nombreux avantages qui ne sont pas inclus dans la comparaison des coûts ci-dessus. En voici des exemples :

  • Période de reproduction plus courte et un plus grand nombre de vêlages durant une même période, ce qui procure plus de veaux commercialisables.
  • L'IA permet de cibler des vaches et des génisses en particulier selon leurs capacités. On peut ainsi choisir des semences de taureau qui faciliteront le vêlage dans le cas des génisses et des traits de carcasse, par exemple, dans le cas des vaches plus âgées, etc.
  • Le programme d'IA planifiée réduit les besoins en main-d'œuvre, ce qui rend plus pratique le recours à cette technologie.
  • Le retrait de taureaux qui circulent sur les lieux permet d'éliminer les animaux plus gros et plus agressifs, ce qui atténue les préoccupations de sécurité autour du bétail. Les taureaux ont aussi tendance à faire beaucoup de dommages aux installations et aux clôtures en s'y frottant.

Chaque exploitant a besoin d'évaluer si l'insémination artificielle peut fonctionner à sa ferme et de quelle manière, le cas échéant. Des recherches menées sur plusieurs années à la station de recherche agricole de New Liskeard montrent que l'insémination artificielle peut être efficace.


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Courriel : ag.info.omafra@ontario.ca