
Épandage de fumier sur soya au lieu de maïs
Le maïs est la culture qui se prête le mieux à recevoir les éléments nutritifs contenus dans le fumier. Le fumier liquide épandu à des doses permettant d'apporter les deux tiers des quantités requises d'azote va habituellement procurer un bon équilibre entre les macro-éléments et les oligoéléments nutritifs nécessaires à l'obtention d'une culture de maïs hautement productive. L'application d'un engrais commercial de démarrage et d'azote pour assurer l'équilibre des besoins de la culture permet de rendre les éléments nutritifs disponibles dès le début de la saison de croissance quand la minéralisation des éléments nutritifs du fumier risque d'être lente.
Dans certaines régions de la province, on trouve des champs en monoculture de maïs depuis plus de 20 ans. Avec l'augmentation de la résistance à la chrysomèle des racines du maïs, il deviendra peut-être nécessaire de diversifier davantage la rotation culturale dans ces champs. Les exploitations concernées seront peut-être aussi obligées de modifier leurs pratiques habituelles d'épandage du fumier.
Il a été démontré que la rotation des cultures augmente les rendements et les choix en matière de lutte contre les mauvaises herbes et les insectes nuisibles. La rotation culturale offre aussi des occasions saisons additionnelles pour l'épandage de fumier ainsi que la possibilité d'épandage à plusieurs saisons. Mais il existe aussi des champs où la monoculture de maïs est une source d'alimentation animale tout en offrant parallèlement des superficies pour l'épandage du fumier. En quoi la planification de la gestion des fumiers sera-t-elle modifiée si des cultures de soya sont introduites dans la rotation?
Le soya n'a jamais été une culture de prédilection pour l'épandage de fumier puisqu'il s'agit d'une légumineuse dont les semences ont été inoculées et que les nodules produits procurent tout l'azote nécessaire. Les gains de rendement ne compensent pas les coûts de l'azote commercial à moins qu'il y ait un problème avec l'inoculation. Le soya donne toujours de meilleurs rendements lorsqu'il est cultivé dans des champs fertiles, mais à moins que le niveau de fertilité du sol soit faible, les apports d'éléments nutritifs aux plants de soya ne procurent pas les mêmes effets qu'au maïs ou au blé.
Une culture de soya de 50 boisseaux/acre prélève environ 190 lb/acre d'azote (produit par les nodules), 40 lb/acre de phosphore et environ 70 lb/acre de potassium, alors qu'une culture de maïs de 185 boisseaux/acre va prélever environ 150 lb/acre de N, 80 lb/acre de P205 et 55 lb/acre de K2O.
Un fumier ordinaire de vaches laitières (5 % de matière sèche) épandu à raison de 5 000 gallons/acre (6 000 gallons américains/acre) va apporter environ 75-55-114 lb/acre de N- P2O5 - K2O. Quand du fumier a été épandu chaque année, il existe aussi des crédits d'azote des épandages antérieurs qui apportent 3 à 5 lb de plus pour chaque 1 000 gallons. L'épandage de fumier de porcs de finition à raison de 5 000 gallons/acre (5 % de matière sèche) procurant environ 140-140-145 lb/acre de N- P2O5 - K2O serait épandu avec à peu près le même crédit d'azote que les applications précédentes.
Un taux d'épandage de 5 000 gallons/acre de fumier de bovin laitier épandu dans un champ en monoculture de maïs donnerait presque le même taux de prélèvement par la culture. Toutefois, épandu dans un champ de soya, ce fumier augmenterait lentement les niveaux de fertilité avec le temps. Avec du fumier de porc épandu chaque année à raison de 5 000 gallons/acre, le P et le K appliqués dépasseraient les éléments nutritifs prélevés et le niveau de fertilité du sol augmenterait rapidement, haussant ainsi les risques de verse et de sclérotiniose dans le soya ainsi que les risques de pertes d'éléments nutritifs dans l'environnement.
Avantages
Le fumier apporte des éléments nutritifs et des oligoéléments au sol, surtout du potassium qui renforce les tiges de soya et contribue à prévenir la verse. Le fumier procure aussi de la matière organique au sol, ce qui aide à soutenir les populations de microorganismes et améliore la capacité de rétention d'eau du sol. La composition des fumiers est très variable, et entraîne donc des différences dans les éléments nutritifs qui sont apportés ainsi que des variations dans la disponibilité de ces derniers et dans la vitesse à laquelle la santé du sol va s'améliorer. Si le fumier est épandu dans une culture de soya pour la première fois, il est important de faire analyser le fumier afin d'adapter la dose d'application en conséquence.
Difficultés
L'azote appliqué dans les champs de soya a pour effet d'augmenter la croissance et la hauteur des plants, bien que cela n'élève pas habituellement les rendements. Des plants plus hauts accroissent les risques de verse. Un excès d'azote, surtout dans le cas des semis tardifs, peut allonger la période de croissance végétative et reproductive et retarder la maturité des gousses.
La sclérotiniose apparaît souvent dans les zones des champs qui présentent le plus haut potentiel de rendement, et cela coïncide souvent avec zones très fertiles où l'humidité est adéquate et où les densités de peuplement sont élevées. L'épandage de fumier augmente la fertilité et la croissance des plants et crée un microclimat idéal pour la sclérotiniose. Cette maladie peut réduire de plus de 50 % le potentiel de rendement dans les zones touchées. L'épandage de fumier doit donc être évité dans les zones de champs ayant des antécédents de sclérotiniose.
Aux endroits où les niveaux de fertilité sont élevés et que celle-ci augmente à la suite d'épandages périodiques de fumier, on assiste aussi à une hausse du risque de perte d'éléments nutritifs dans les eaux de ruissellement et dans l'eau qui s'échappe des tuyaux de drainage. Si les analyses de sol montrent une hausse des concentrations en phosphore au-delà de 30 ppm, le risque de pertes de phosphore augmente rapidement. Étant donné que la plus grande partie du phosphore lessivé par ruissellement et dans l'eau des tuyaux de drainage est sous forme soluble, il contribue à l'eutrophisation ainsi qu'à la prolifération d'algues dans les cours d'eau. Les pertes d'azote peuvent aussi être importantes. Toute quantité d'azote non utilisée par la culture restera dans le sol sous forme de nitrate et, durant l'automne et l'hiver, circulera dans l'eau du sol sous la zone des racines et dans l'eau des tuyaux de drainage. Les cultures de couverture semées après la récolte aident à fixer les restes d'azote dans la biomasse.
Conseils à ceux qui planifient d'épandre du fumier dans le soya
- Faire analyser le fumier afin de mieux établir les doses d'épandage qui minimiseront les applications excessives d'azote et de phosphore.
- Garder les apports d'azote sous forme d'ammonium assimilable par la culture à moins de 75 lb/acre. Une quantité excessive d'azote augmentera beaucoup les risques de verse et de sclérotiniose.
- Choisir un cultivar qui est physiquement plus court et qui présente un indice favorable de sensibilité à la verse (voir les essais de performance à gosoy.ca).
- Semer un cultivar qui présente une certaine tolérance à la sclérotiniose selon les indications fournies dans certains catalogues de semences.
- Réduire les densités de peuplement au nombre le plus bas des valeurs idéales suggérées selon l'emplacement du champ et la texture du sol.
- Prévoir un espacement plus large entre les rangs afin d'accroître la circulation d'air à travers le feuillage et réduire éventuellement les risques de sclérotiniose.
- Recourir à de bonnes pratiques en matière de gestion des éléments nutritifs (bonne source d'approvisionnement, bon dosage, bonne période d'application et bon site d'épandage) afin de tirer profit au maximum de leur utilisation par la culture.
- Si les niveaux de fertilité du sol augmentent rapidement, envisager d'épandre le fumier dans d'autres champs qui ont besoin d'éléments nutritifs ou de vendre ou échanger du fumier avec un voisin qui n'a pas accès à du fumier.
Pour plus de renseignements :
Sans frais : 1 877 424-1300
Local : 519 826-4047
Courriel : ag.info.omafra@ontario.ca
Auteur : | Christine Brown, spécialiste de la durabilité des grandes cultures /MAAARO |
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Date de création : | novembre 2020 |
Dernière révision : | novembre 2020 |