
Effet de la sensibilité à la photopériode sur le choix des cultivars de soya
Bon nombre de cultures présentent deux stades de croissance distincts, soit le stade végétatif et le stade reproducteur. Dans le cas du soya, le stade végétatif dure habituellement de 30 à 50 jours après la levée. Le stade reproducteur commence à l'apparition de la première fleur sur le plant. Le soya se distingue par le fait que sa croissance végétative (nombre de feuilles et de nœuds et poids à sec) se poursuit pendant la formation des fleurs. La floraison est déclenchée par la longueur des jours bien que la température y contribue aussi de manière importante. C'est ce qui explique qu'on dise que le soya est « sensible à la photopériode ». La photopériode correspond à la période de la journée durant laquelle la plante est exposée à la lumière (longueur du jour).
La floraison des plants de soya commence quand les jours raccourcissent après le solstice d'été le 21 juin. Sous des conditions optimales de croissance, le soya semé tôt en saison peut commencer à fleurir avant le solstice d'été, mais il atteint la pleine floraison uniquement après ce dernier. Le déclenchement de la floraison n'est pas le seul effet de la photopériode sur les plants de soya. La longueur des jours influe aussi sur de nombreuses étapes du stade reproducteur. L'effet semble cumulatif, car plus les jours sont courts, plus le plant de soya traversera rapidement les différents stades de croissance. Une étude menée au Wisconsin a montré que la période entre le stade de croissance R1 (première fleur) et le stade R6 (semence entière) était beaucoup plus courte dans le cas des plants de soya semés tardivement comparativement aux plants semés plus tôt. La période entre les stades R1 et R6 de cultivars identiques de soya semés le 1er mai a duré 60 jours comparativement à 45 jours pour des semis effectués le 1er juin.
La rapidité à laquelle un plant de soya traverse les stades de croissance dépend non seulement de la longueur des jours, mais de l'humidité ambiante, de la santé du plant et de la température. Le temps requis pour qu'un plant de soya parvienne à maturité n'est donc pas facile à prédire comme pour d'autres cultures (le maïs, par exemple), car cette durée dépend à la fois du cultivar, des conditions du milieu, de la longueur des jours et de la date de semis. Il n'existe donc pas de grille précise pour estimer le nombre de jours compris entre l'apparition de la première fleur et la maturité physiologique. Le fait que le soya soit sensible à la photopériode signifie aussi que le plant peut s'adapter à la saison et se rattraper d'une certaine manière lorsque les semis sont retardés. La photopériode et la température font en sorte que les plants accélèrent leur mûrissement quand les jours raccourcissent à l'automne.
Les cultivars de soya à maturité hâtive sont-ils moins sensibles à la photopériode?
Les cultivars de soya sont classés par groupe de maturité (MG). Les 13 groupes de maturité sont exprimés en chiffres romains (le MG 000 étant le plus hâtif et le MG X le plus tardif). En raison des différences de climat présentes lorsqu'on se déplace du sud au nord de l'Ontario, les groupes de maturité des cultivars de soya varient de MG 00 à MG III dans la province. Étant donné que les sélectionneurs de végétaux ont mis au point des cultivars adaptés à de très courtes saisons de croissance comme dans le nord de l'Ontario et l'ouest du Canada, ces cultivars sont devenus moins sensibles à la photopériode que les cultivars à maturité plus tardive. Une étude sur les cultivars nord-américains de soya a montré que les cultivars à maturité hâtive (aussi appelés de saison courte) affichent peu de sensibilité à la photopériode comparativement aux cultivars plus tardifs (aussi appelés de saison longue) (voir la figure 1). Cette observation est logique puisque les cultivars très hâtifs n'ont tout simplement pas le temps de s'adapter à la saison. Ils parviennent à maturité aussi rapidement que les plants peuvent traverser physiologiquement leurs différents stades de croissance.
Figure 1. Sensibilité relative à la photopériode de cultivars de soya nord-américains. Source : Jiang et coll., 2014.
Quand devient-il nécessaire de passer aux cultivars à maturité plus hâtive?
Il arrive certaines années que les semis soient retardés. Cependant, contrairement au maïs, cela ne signifie pas qu'il soit toujours nécessaire de se tourner alors vers des cultivars plus hâtifs. La sensibilité du soya à la photopériode permet de faire des semis raisonnablement plus tard sans empêcher les plants d'atteindre la maturité physiologique avant un gel meurtrier. Pour cette raison, les agronomes ont suggéré qu'il n'était pas nécessaire de passer à un cultivar de plus courte saison avant au moins la mi-juin. Étant donné qu'il y a des limites dans les possibilités d'adaptation des plants, la date du 15 juin avait été proposée comme date butoir pour changer de type de cultivar. En 2019, le MAAARO a effectué quatre essais afin d'évaluer cette stratégie. Les résultats ont montré que le choix d'un cultivar adapté dans une région donnée était associé à des rendements plus élevés que de passer à un cultivar hâtif lorsque les semis étaient faits après le 15 juin. De plus, ce qui est tout aussi important, l'assèchement se déroulait normalement à l'automne dans le cas des semis avec un cultivar adapté effectués après le 15 juin (voir le tableau Table 1).
Tableau 1. Rendements de soya semé tardivement en 2019
Cultivar de soya * | Semis faits entre le 4 et le 12 juin boisseaux/acre (% d'humidité) | Semis faits entre le 15 et le 22 juinboisseaux/acre (% d'humidité) |
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1 Hâtif | 52,2 (13-15) | 55,3 (14-17) |
2 Adapté | 59,1 (14-16) | 58,9 (15-17) |
3 Tardif | 57,9 (18-22) | 59,0 (18-26) |
*Les cultivars ont été considérés comme adaptés à une région donnée selon la carte des groupes de maturités présentée sur le site gosoy.ca. Les groupes de maturité des cultivars hâtifs avaient des cotes d'environ 0,5 inférieures à celles des cultivars adaptés et les cotes des groupes de maturité des cultivars tardifs étaient de 0,5 à 1,0 plus élevées que les cultivars adaptés. Les essais ont été réalisés à Elora, Bornholm, St. Thomas et Ridgetown.
Bien que les cultivars considérés comme plus tardifs que les variétés adaptées à une région donnée ont donné de bons rendements, la récolte a dû être retardée et la teneur en humidité de la récolte était assez élevée (18 à 26 % d'humidité). Les cultivars de soya évalués appartenaient tous à des groupes de maturité MG 0 ou plus. Il est évident que ces cultivars sont encore suffisamment sensibles à la photopériode pour s'adapter à la saison. Jusqu'à maintenant, on dispose de peu de preuves qu'il soit nécessaire de passer à un cultivar de saison courte pour les semis effectués après le 15 juin. Signalons toutefois que dans le cas où les semis sont retardés au-delà de la limite fixée par l'assurance-récolte (fin de juin), d'autres études ont montré qu'il est nécessaire de passer à des cultivars de saison courte pour que la culture parvienne à maturité et pour maximiser les rendements. Une étude plus exhaustive sera menée en 2020 afin d'évaluer la date optimale de transition vers les cultivars hâtifs à divers endroits. L'étude permettra en outre, et c'est ce qui est le plus important, d'évaluer la date optimale à laquelle on doit semer du soya plutôt que du maïs pour une rentabilité maximale.
Pour plus de renseignements :
Sans frais : 1 877 424-1300
Local : 519 826-4047
Courriel : ag.info.omafra@ontario.ca
Auteur : | Horst Bohner, Soybean Specialist/OMAFRA |
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Date de création : | mars 2020 |
Dernière révision : | mars 2020 |