
S'agit-il de pois avec un cas grave d'envahissement de moutarde? Non, il s'agit de « poiola »!
La ferme de Jennifer et Mike Doelman est située près de Douglas, en Ontario, et Mike a récemment fait part de son expérience de la culture de « peaola » qu'on pourrait traduire par « poiola », dans le cadre d'un événement organisé par l'Ontario Soil Network. L'objectif de cet organisme est d'améliorer les sols de l'Ontario. La culture de « poiola » est en fait une culture intercalaire de pois et de canola dans un même champ, au même moment. La figure 1 montre le champ des Doelman en 2019 alors que les deux cultures étaient en floraison.
La culture de pois en soi peut être difficile. Une fois que les pois sont parvenus à maturité, ils tendent en effet à verser et à s'affaisser et leurs tiges se détériorent rapidement, ce qui complique la récolte et diminue la qualité des pois. Le canola qui pousse à côté des pois soutient ces derniers, ce qui permet d'éviter le problème, selon Mike Doelman.
Figure 1. Canola en fleur dans un champ de « poiola », en 2019. Photo : Jennifer et Mike Doelman, BDS Farms.
Contexte
Il y a plusieurs avantages à faire pousser deux cultures ensemble. Les cultures intercalaires d'orge et d'avoine se pratiquent depuis longtemps. Des recherches antérieures ont montré que ce genre de culture était associé à moins de maladie. De plus, dans divers types de sol et sous des conditions variables de drainage, on obtient ainsi des rendements plus élevés que lorsqu'on cultive une seule culture. Le canola est reconnu pour réprimer la croissance des mycorhizes dans le sol, ce qui peut nuire à la fertilité de ce dernier en affectant particulièrement la dynamique entre la disponibilité du phosphore et de l'azote. Jeff Schoenau, professeur de science des sols à l'Université de la Saskatchewan à Saskatoon, a entrepris une étude sur les cultures intercalaires pois-moutarde et pois chiches-lin. Il vient juste de commencer à analyser les échantillons recueillis dans les champs durant la saison 2019, mais selon lui ce qui est le plus marquant visuellement, c'est la réduction de la maladie dans les pois chiches lorsqu'ils sont cultivés avec du lin.
La plupart des superficies comportant des cultures intercalaires se trouvent dans l'Ouest canadien. Le tableau 1 montre les mélanges de cultures intercalaires et les superficies correspondantes cultivées en 2019 assurées par la Saskatchewan Crop Insurance (ces chiffres n'incluent pas les superficies non assurées).
Tableau 1. Superficies cultivées en 2019 de chaque mélange de cultures intercalaires assurées par la Saskatchewan Crop Insurance
Cultures intercalaires | Acres |
---|---|
Total des superficies assurées en 2019 par la SCIC |
72 400
|
Canola/pois |
17 850
|
Lentilles/blé |
17 000
|
Avoine/pois |
10 510
|
Pois chiches/lin (une partie avec avoine) |
4000
|
Orge/pois |
2840
|
Lin/avoine |
2140
|
Moutarde/pois |
1543
|
Lentilles/moutarde |
1340
|
Lentilles/avoine |
1340
|
Lin/lentilles |
515
|
Source : Christie Wolfe
Cultures intercalaires
Certains points méritent toutefois réflexion avant de décider de cultiver deux cultures ensemble. D'abord, la plupart des cultures une fois récoltées doivent être séparées pour être mises en marché (sauf bien sûr, les grains mélangés pour l'alimentation animale, comme l'orge et l'avoine). La taille des gains doit être suffisamment différente pour qu'un nettoyeur à grains puissent séparer les deux cultures. Il faut aussi que les deux cultures parviennent à maturité à peu près au même moment pour assurer la qualité de la récolte. On doit également tenir compte de la grosseur des semences, de la date des semis, de la profondeur de ces derniers, de la fertilité et du désherbage.
Les Doelman ont semé des pois fourragers à raison de 75 lb/acre et du canola à un taux de 3,75 lb/acre. Les semences de canola étaient des BASF Invigor L233P traitées avec Lumiderm. Les semences de canola et de pois ont été mises en terre par semis direct dans des chaumes de soya. Le canola a été semé avec le premier semoir et les pois avec l'autre. Aucun engrais de démarrage n'a été appliqué avec la semence. Les analyses des échantillons de sol ont montré que la fertilité de ce dernier était de bonne à élevée avec des teneurs en phosphore (P) allant de 17 à 32 ppm, de plus de 230 ppm pour le potassium (K) et une teneur en matière organique (MO) de 4,6 % en moyenne pour les deux champs. Un engrais 21-0-0 avec 24 % de soufre et 0,3 % de bore a été appliqué à la volée à raison de 150 lb/acre en prélevée. Une application du fongicide Priaxor à raison de 0,12 L/acre a été effectuée le 12 juillet 2019.
La culture de « poiola » a été récoltée et entreposée à plat, puis passée dans un tamis rotatif afin de séparer le canola des pois. « Le canola était relativement facile à recueillir et a ensuite été combiné sans problème avec d'autres chargements de canola récolté seul », a signalé Jennifer.
Résultats
Après un printemps plus humide que la normale, l'été 2019 a été sec. Les pois présentaient un pointage en matière de verse de 7 sur 10. Selon les Doelman, les pois étaient assez affaissés, mais le canola leur a permis de relever les plants beaucoup plus facilement que dans les champs où les pois fourragers étaient cultivés seuls. Ce fut, en fait, la récolte de pois la plus facile qu'ils ont connue. La figure 2 montre la résistance à la verse de la culture de « poiola » au moment de la récolte 2019.
Figure 2. Résistance à la verse de la culture de « poiola » au moment de la récolte 2019. Photo : Jennifer et Mike Doelman, BDS Farms.
Le rendement total était autour de 150 tonnes sur 134 acres. Environ 110 tonnes provenaient des pois et 40 tonnes du canola. La figure 3 représente le mélange de pois et de canola qui a été récolté. La figure 4 montre la séparation du canola et des pois dans un tamis rotatif.
Figure 3. Mélange de la récolte de canola et de pois. Photo : Jennifer et Mike Doelman, BDS Farms.
Figure 4. Tamis rotatif utilisé pour séparer le canola des pois. Photo : Jennifer et Mike Doelman, BDS Farms.
« La séparation des pois du canola a demandé pas mal de travail, mais nous tentons de simplifier le procédé. Il faut un bon recouvrement du sol pour réduire les mauvaises herbes, et un peuplement dense est efficace contre celles-ci. C'est notre deuxième année de cette culture et nous comptons la refaire encore! ».
Pour plus de renseignements :
Sans frais : 1 877 424-1300
Local : 519 826-4047
Courriel : ag.info.omafra@ontario.ca
Auteur : |
Scott Banks, spécialiste
des systèmes de production des cultures/MAAARO |
---|---|
Date de création : | octobre 2019 |
Dernière révision : | dd SPACE fullmonth SPACE yyyy |